vendredi 21 août 2009

Un petit coup de polish.

Parce que vous êtes des lecteurs aussi avisés qu’assidus de ce noble blog, ou simplement parce que vous n’êtes pas con comme un sous-verre, vous le savez déjà : les libraires ne passent pas leur temps, je veux dire leur temps de travail, à lire. Pour plusieurs raisons simples et reliées serré entre elles, mais pour dire vite : pas le temps. D’accord, on lit un peu; disons qu’on feuillette, bouquine, fréquente d’un œil qu’on voudrait quelque peu expert cette masse envahissante de livres.
Pareil pour la parlotte. On ne peut espérer tenir une conversation en pleine boutique. Il n’y a pas le temps, le calme, le lieu (en un mot, les circonstances) pour ça. Bien entendu nos patrons ne seraient de toute façon pas du tout d’accord, mais ce n’est qu’un point de vue différent pour le même résultat. Sans nommer la catégorie de salariés à laquelle vous pensez (et dont vous faites, peut-être partie), dont les membres sont réputés ne pas se priver de longues conversations autour de la photocopieuse, avouons qu’il existe des contextes plus propices au bavardage qu’une librairie, un commerce donc.
(«Et pendant les périodes creuses?», demande le petit finfin au fond de la salle, avec un petit rire gêné qu’il souffle par son nez trop curieux. Et bien, pour répondre vite, il y a peut-être des périodes creuses en terme de clientèle, ce qu’on ne souhaite pas; mais ce ne sont pas des périodes creuses question travail. On en profite alors entre autres pour ranger, classer, faire des retours, etc.)

Bref, où je veux en venir, c’est que si on n’a que rarement de véritable conversation sur notre lieu de travail, on communique, on se parle, on trouve le temps de se faire des blagues, des taquineries, des clins d’œil, tout cela en une sorte de grande conversation décousue et, par nature, inachevée.

C’était à l’été 2007, je crois. Un ou deux libraires avaient vu le premier OSS 117. Ils avaient prêté le film à un collègue, puis à un autre, qui l’avait regardé avec un cinquième (?). Rapidement, le film fait le tour; certains le voient pour la deuxième ou troisième fois. Vous avez déjà compris ce qui a fini par arriver…
Vous croisez un collègue entre les rayons Spiritualité et Sciences Humaines. Il est pressé, il cherche la dernière copie restante de Dieu n’est pas grand. Vous êtes pressé aussi de toute façon, donc pas le temps pour les mondanités. On pourrait sortir prendre un verre ce soir, mais non, vous avez des lectures en retard. Si l’on veut un peu de «communication», c’est tout de suite et il faut faire ça court. Plutôt qu’un «Hello beauté» livré avec votre meilleure imitation de la voix de Barry White, vous lui lancez : «en tous cas on peut dire que le soviet éponge» ou «j’aime quand on m’enduit d’huile». Ce genre de chose. Hors contexte, c’est drôle parce qu’absurde, bizarre, déjanté et… hors contexte, quoi. Mais si le collègue a vu le film, il se peut bien qu’il vous réponde par une question, genre «comment est la blanquette?»
Ça a duré des semaines. Ce n’est pas tout à fait fini en fait; de temps en temps il y en a un pour vous dire : «à l’occasion, je vous mettrai un petit coup de polish». D’accord celle-là n’est peut-être pas tout à fait recommandée hors contexte, mais pour un oss-ophile averti, c’est une réplique classique.

L’année d’après c’est Marc Labrèche qui a fait les délices de nos crinqués de la citation à gogo, avec son sketch parodie de Curieux Bégin. Je sais, chez vous aussi, probablement. Tout le Québec ou presque est tombé dedans. Et bien, nous également; vous voyez, les libraires sont pas des bibittes si bizarres que ça, ils peuvent rire même si la blague vient pas de l’Encyclopédie de la Pléiade. Pendant la fin de l’automne 2008 et l’hiver qui suivit les «Ch’uis comédien» et «Vino, les gouines?» fusaient. Et s’il fallait aller chercher une copie du Monde sans fin dans la réserve? «On va y aller en scooter!»
Ce phénomène de citations qui font boule de neige est difficile à expliquer, et impossible à contrôler. Après avoir vu le dernier OSS 117, j’ai bien lancé quelque fois que «le difficile c’est la partie pédalo, c’est pas la partie canard», et réussit à faire rire, je crois, mais ça n’a pas tellement eu de suite. Mettons que ça n’a pas décollé. Est-ce parce que OSS 117 : Rio ne répond plus contient moins de répliques-potentiellement-cultes que Le Caire, nid d’espion?
Ce qui est cool c’est que je le sais pas, puis j’ai un bracelet en cuir.

3 commentaires:

  1. Moi, tout ce que je me demande après ça, c'est: qui c'était les chinois alliés avec les allemands pendant le 2ème guerre mondiale?

    Gedam

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  2. Armand : "Pour attraper M.Lee vous avez besoin d'une bonne couverture..."

    OSS 117 : "Bien sûr sinon je serai dans de beau draps !"

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  3. "Mais qu'est-ce que c'est que ce guet-apens?"

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